đ„ Club VĂ©ritĂ© « à chaque fois on se dit quâon va Ă©crire une chanson drĂŽle. Et puis Soline commence avec des accords mineurs … »

Si vous aussi vous prĂ©fĂ©rez ĂȘtre du cĂŽtĂ© de la vĂ©racitĂ© vraie, vous succomberez certainement au Club VĂ©ritĂ©. Mais comment s’apprĂ©cient les certitudes dans ce futur hyper branlant ? Certainement bien assis sur le velours moite d’un siĂšge rouge de music-hall, en regardant Charlotte et Soline vous rĂ©citer en spectacle leurs chansons-rĂ©alitĂ© ayant survĂ©cu aux derniers jours du disco, de l’opĂ©rette et des hit-parades des 80’s.
Pour leurs dĂ©buts derriĂšre le micro et sur scĂšne, leurs mots sont tantĂŽt tranchants tantĂŽt innocents. On se transforme, on rit de bon cĆur et puis on pleure. Quand nos sentiments les plus exubĂ©rants s’inhibent, Club VĂ©ritĂ© nous les remet Ă l’endroit. « Quand fourche ma langue j’ai lĂ un fou rire aussi fou qu’un phĂ©nomĂšne » disait Lolita.
Entretien vérité (ben oui, forcément).
Piste 1 : Salut Club VĂ©ritĂ©. Rentrons dans le vif du sujet : comment une partie de ping-pong a Ă©tĂ© Ă lâorigine de la crĂ©ation de votre duo musical ?
Charlotte : Câest une grosse mĂ©taphore, on nâa jamais jouĂ© au ping-pong ensemble ! Ce nâĂ©tait pas une vraie partie de ping-pong.
Me voilĂ déçu … mais ça mâintĂ©resse quand mĂȘme !
Soline : La partie de ping-pong Ă©tait une âpartie de rĂ©ponsesâ entre nous. Pendant le covid on Ă©tait Ă distance et on sâenvoyait des messages, des chansons … On se renvoyait la balle.
Charlotte : Refaisons peut-ĂȘtre la genĂšse de notre duo. Il y a cinq ans on a eu envie de faire un groupe de musique fantasmĂ©, qui s’appellerait âRoland et les fillesâ. Mais on Ă©tait trop nombreuses, on Ă©tait cinq filles ⊠au final ça ne sâest pas concrĂ©tisĂ© et tout est restĂ© Ă lâĂ©tat de fantasme. Et puis lâannĂ©e derniĂšre, avant le Covid, avec Soline on sâest dit quâil fallait vraiment quâon reprenne notre envie. Câest vrai que dans ce premier groupe de filles, il nây avait que Soline et moi qui jouions un peu de musique, on bricolait. Alors, on a commencĂ© par crĂ©er une playlist dâinspirations communes Ă deux âŠ
Soline : Câest en se retrouvant aprĂšs le dĂ©confinement quâon a vraiment commencĂ© Ă travailler sur nos chansons.
Votre musique mâa fait tout de suite penser Ă une pop rĂ©tro lĂ©gĂšre, synthĂ©tique, sucrĂ©e. Jâai par exemple pensĂ© Ă la chanson espagnole de Jeanette âPorque te vas?â. CâĂ©tait le genre de morceaux que contenait votre playlist par exemple ?
Charlotte : Oui, câest sĂ»r que cette chanson a Ă©tĂ© une bonne rĂ©fĂ©rence ! On lâavait en trois versions dans notre playlist, dont une version française chantĂ©e par lâartiste Clio, que vous avez aussi interviewĂ©e dâailleurs ! Et puis notre liste contenait aussi pas mal de vieilles chansons françaises des annĂ©es 60.
Soline : Mais aussi beaucoup de morceaux de pop actuelle.
Et dans cette playlist il y avait aussi des morceaux de pop anglophone ?
Soline : Au dĂ©but on a vraiment essayĂ© de rester dans un rĂ©pertoire de chansons francophones. Mais oui, en sâautorisant quelques Ă©carts bien sĂ»r avec des chansons anglophones mais aussi espagnoles ou italiennes, plutĂŽt des annĂ©es 60 âŠ
Charlotte : Sinon, les groupes francophones plus actuels quâon a beaucoup Ă©coutĂ©, câĂ©tait Videoclub, Toboggan, Genoux VĂ©ner, Charlotte Fever, Vendredi sur Mer âŠ
Soline : Et aussi Catastrophe, La Femme, Reymour, Arielle Tombale …
Charlotte : Mais aussi des choses plus anciennes. Bernard Lavilliers et Serge Gainsbourg. Je suis amoureuse de Serge Gainsbourg.
Soline : Et puis France Gall et Véronique Sanson bien sûr !
Donc vous partagiez plutĂŽt un goĂ»t pour le rĂ©tro tout de mĂȘme ?
Charlotte : Oui ! Et des chansons bien annĂ©es 60 dans les orchestrations aussi, comme celles de Christophe. On en a aussi profitĂ© pour creuser et trouver des chansons gĂ©niales chantĂ©es par des artistes qui nâont chantĂ© quâune fois dans leur vie.
Comme la chanson âSans Mensongeâ de lâactrice Marie Gillain dont jâai adorĂ© votre reprise sur lâalbum, et que jâai trouvĂ© trĂšs bien faite, bravo !
Soline : Merci ! Mais on nâa pas Ă©tĂ© toutes seules sur le coup, on a bossĂ© avec un ingĂ©nieur du son rennais du nom de Chombi, qui a super bien fait le taf. Sur notre album, il a fait des arrangements, le mixage, le mastering !
Charlotte : âSans mensongeâ câest une collaboration Ă trois avec Chombi ! Il faut vraiment parler de lui parce quâil est formidable ! Ă la base nos chansons Ă©taient bien plus artisanales dans leur rendu. Il y avait certes un charme quâon a un peu perdu, mais on a gagnĂ© en plein dâautres aspects.

Depuis combien de temps faites-vous de la musique, vous qui avez une autre activitĂ© dâartistes visuelles ?
Soline : Avec Charlotte on se complĂšte parce quâon a appris vraiment diffĂ©remment la musique. Jâai appris de maniĂšre assez scolaire et acadĂ©mique, avec des cours de mes dix Ă vingt ans, principalement autour du rĂ©pertoire classique. Jâai arrĂȘtĂ© en commençant mes Ă©tudes, mais je me suis rĂ©cemment achetĂ© un piano numĂ©rique pour ne pas perdre cette pratique, et ça coĂŻncidait avec lâenvie de Charlotte de dĂ©buter un groupe.
Charlotte : Jâai un pĂšre musicien qui ne connaĂźt pas le solfĂšge, mais il mâa appris les accords, et avec cela je joue un petit peu de guitare, un peu dâaccordĂ©on chromatique et un peu de piano …
Soline : Mais tu te débrouilles trÚs bien, car tu as un sens pour la composition !
Charlotte : Merci Soso !
Et vous composez toutes les deux au piano ?
Soline : Oui, on part du piano à chaque fois, et puis on passe aux logiciels électroniques en choisissant nos sons.
Charlotte : On fait tout ensemble. Il nây en a pas une qui Ă©crit plus que lâautre les paroles.
Soline : Il y a certaines chansons plutĂŽt Ă©crites par lâune ou lâautre dâentre nous, mais il nây a pas de rĂšgles, il y a des chansons pour lesquelles on est deux Ă Ă©crire, Ă composer. Tout est naturel entre nous, on ne sâest jamais attribuĂ© de rĂŽle. On aime bien tout faire ensemble.
Charlotte : Câest surtout que je nous considĂšre comme deux âhandicapĂ©es de la musiqueâ, alors ensemble on se complĂšte, on apprend.
Parlons de votre spectacle, câest quoi votre intention, votre projet autour de cette crĂ©ation visuelle ? Club VĂ©ritĂ© doit dâabord se voir avant de sâĂ©couter ?
Charlotte : Non, toi tu ne lâas pas encore vu notre spectacle par exemple et ça ne tâempĂȘche pas de nous poser des questions aujourdâhui sur nos chansons !
Câest vrai ! Mais alors, quel est votre projet autour de cette crĂ©ation visuelle ?
Charlotte : Je pense que ça vient du fait quâau dĂ©part de Club VĂ©ritĂ©, on avait beau ĂȘtre trĂšs enthousiasmĂ©es par ce projet, on ne croyait pas non plus Ă fond au fait de faire de la musique toutes les deux.
Soline : CâĂ©tait dur de se considĂ©rer comme lĂ©gitimes Ă faire de la musique, de proposer des concerts alors quâon nâavait jamais fait ça auparavant !
Charlotte : CrĂ©er un spectacle autour de nos chansons, câĂ©tait peut-ĂȘtre un moyen cachĂ© pour nous de faire en sorte que si notre projet ne plaisait pas musicalement, il pourrait au moins plaire visuellement. Quelque part, ça partait un peu de cette volontĂ©.
Soline : Mais je pense aussi que cela vient dâune volontĂ© de Charlotte Ă la base, et de son travail dâartiste visuelle qui a une pratique de la performance et de la crĂ©ation de costumes. De mon cĂŽtĂ© je ne me voyais pas du tout faire un spectacle au dĂ©part âŠ
Charlotte : Alors quâen fait câest elle la vraie bĂȘte de scĂšne (rires) !
Soline : On sâest dit quâon allait plus se marrer Ă crĂ©er des Ă©lĂ©ments visuels et proposer ce spectacle, plutĂŽt que de simplement voir Charlotte chanter sur une piste de son.
Charlotte : On a donc transformĂ© le rĂŽle qui aurait pu ĂȘtre celui de lâaccompagnatrice musicale en un rĂŽle de danseuse ! On danse Ă la place de jouer nos instruments en live.
Soline : MĂȘme si peut-ĂȘtre que tout cela Ă©voluera avec le temps dans nos spectacles, et que le piano sera jouĂ© live.
Charlotte : « On adore cette esthétique music-hall, qui a été une explosion de joie aprÚs un moment dévastateur. »

Il y a un tableau, un décor visuel différent pour chacune de vos chansons pendant ce spectacle ?
Soline : Oui, lors de l’interprĂ©tation de chaque chanson des choses diffĂ©rentes se passent, en trois parties, pour un spectacle de 35-40 minutes. Il y a des changements de costumes, tous créés par Charlotte. Et on a créé ensemble la mise en scĂšne, la scĂ©nographie.
Et dans l’enchaĂźnement des chansons, lâaction suit un dĂ©roulement avec un dĂ©but et une fin ?
Charlotte : Le dĂ©roulement du spectacle vient des idĂ©es visuelles. Comme il y a des Ă©lĂ©ments qui sortent des costumes, nous avions aussi des contraintes logistiques. Nos costumes sont des choses qui sâajoutent petit Ă petit en sâenlevant. Donc lâordre des chansons a aussi Ă©tĂ© contraint par la conception de ces costumes.
DâoĂč le mot de âtransformismeâ que vous utilisez pour prĂ©senter votre spectacle. Câest une dimension Ă la base de votre projet, dans un esprit un peu âcabaretâ ?
Charlotte : Oui, on adore cette esthĂ©tique music-hall. Je me suis intĂ©ressĂ©e Ă lâhistoire du music-hall, qui est apparu aprĂšs la premiĂšre guerre mondiale et a Ă©tĂ© une explosion de joie aprĂšs un moment dĂ©vastateur. Et donc, le post-covid pour moi câĂ©tait une occasion de rĂ©injecter de lâesthĂ©tique music-hall, qui contient en plus des cĂŽtĂ©s un peu naĂŻfs et enfantins, ce que nous sommes toutes les deux. On se marre beaucoup dans la vie de tous les jours, cette esthĂ©tique colle donc parfaitement Ă ce que nous sommes avec Soline.
Soline : On nous dit souvent que nous formons avec Charlotte un duo burlesque dans la vie de tous les jours, et que cette complicité qui existe entre nous est visible dans notre performance.
Charlotte : Câest touchant ce que tu dis, ça va me faire pleurer !
Parfait que vous pleuriez, car ça tombe bien avec ma prochaine question ! En effet, en Ă©coutant votre musique, et sous ses allures lĂ©gĂšres et sautillantes, on perçoit presque Ă chacune de vos chansons une vraie mĂ©lancolie bien prĂ©sente. Par exemple, la chanson âFantĂŽme reggaeâ a, sous son humour, des allures froides et mĂ©lancoliques. âSlow Ă vĂ©loâ est plutĂŽt lĂ©gĂšre mais Ă©galement romantico-triste. MĂȘme votre reprise du morceau plutĂŽt lĂ©ger âSans mensongeâ contient une dimension douce-amĂšre je trouve.
Charlotte : A chaque fois on se dit quâon va Ă©crire une chanson drĂŽle. Et puis Soline commence avec des accords mineurs … (rires) Alors comment se dĂ©brouiller pour Ă©crire une chanson drĂŽle sur des accords mineurs ?
Soline : Oui, on est toujours un peu là -dedans, dans cette mélancolie. Dans notre spectacle, sur les chansons un peu plus tristes on essaye toujours de contrebalancer visuellement cette mélancolie afin de la tourner en dérision. Les gros chagrins, les grosses tristesses, on arrive alors à en rire.
Charlotte : GĂ©nĂ©rer Ă la fois de la joie et de la tristesse dans un morceau, il nây a rien de plus fort Ă©motionnellement. Ces morceaux sont ce que nous sommes, toujours dans des sentiments paradoxaux qui gĂ©nĂšrent aussi le sentiment dâĂȘtre vivant. Et, on nây avait pas trop pensĂ© au dĂ©part, mais finalement il y a un cĂŽtĂ© un peu ambigu dans notre projet. Dans notre spectacle, nous sommes souvent habillĂ©es en âlolitaâ, avec des chansons un peu mĂ©lancoliques, mais aussi une dimension clownesque et enfantine. Et donc il y a cette ambivalence. Cette figure de la lolita nâest pas non plus tout Ă fait innocente, mine de rien. Jâaime bien cette ambiguĂŻtĂ©.
Parce que la figure de la lolita contient rĂ©ellement ce cĂŽtĂ© triste, dâun personnage exploitĂ©, instrumentalisĂ© âŠ
Charlotte : Câest un personnage qui a conscience du pouvoir de son charme mais qui est Ă©galement un peu ballotĂ© par les alĂ©as de la vie.
Jâallais justement dire que cette ambiguĂŻtĂ© entre sentiments doux et amers, câest ce qui vous place dans la chanson française. Parce que je ne sais pas si vous ĂȘtes dâaccord avec moi, mais la chanson française la plus vĂ©nĂ©rĂ©e est souvent tout de mĂȘme la plus Ă©mouvante, pour ne pas dire mĂ©lancolique ⊠Club VĂ©ritĂ© sâinscrit dans cet hĂ©ritage, dans ce charme un peu français de la chanson ?
Charlotte : Il faut dire aussi quâil est beaucoup plus facile dâĂ©crire une chanson triste quâune chanson gaie. On sâest souvent arrachĂ© la tĂȘte sur les textes en voulant Ă©crire des chansons plus joyeuses.
Soline : Mais on adore aussi Ă©crire des chansons comme âLes cheveux dans le ventâ qui nâa pas Ă©tĂ© Ă©crite dans un esprit mĂ©lancolique.
Câest peut-ĂȘtre une des seules de lâalbum dâailleurs ?
Soline : Non il y a aussi âBigZoubisousâ, notre double-reprise de Carlos et de Gillian Hills. âChenille leu-leuâ aussi, mais elle nâest pas complĂštement joyeuse. MĂȘme si câest une cĂ©lĂ©bration de la fĂȘte, des soirĂ©es oĂč lâon danse toute la nuit et de ce quâon peut exprimer avec nos corps dans ces moments-lĂ , ça dit aussi quâil nây a pas que de la joie qui sâexprime dans ces moments de transe.
Charlotte : Il y a âRhume tropicalâ qui parle dâangoisses et dâhypochondrie avec autodĂ©rision !
Soline : Câest vrai que nos chansons se situent souvent entre deux registres tout de mĂȘme.
Comment sâinscrit lâunivers de Jacques Demy, que vous citez dans votre prĂ©sentation, dans votre crĂ©ation Ă toutes les deux ? Jâai comme ma petite idĂ©e lĂ -dessus mais je vous laisse en parler.
Charlotte : Jacques Demy, câest la recherche de lâenchantement. Mais un enchantement sur fond de mĂ©lancolie aussi. Parfois, ses personnages ne se rencontrent pas. Il y a des amours impossibles dans un univers flamboyant. Câest une rĂ©fĂ©rence ultime. Jâaime aussi la lĂ©gĂšretĂ© qui se dĂ©gage de ses Ćuvres, sa poĂ©sie fanfreluche.
Soline : Fanfreluche ! (rires)
Charlotte (Ă Soline) : Ăa fait longtemps que tu nâas pas entendu ça, hein ?
Charlotte : « On sâĂ©lĂšve mutuellement dans notre construction musicale. Câest quand mĂȘme cool de partir avec des bĂ©quilles pour vivre quelque chose dâaussi fort avec quelquâun et ne faire quâun. »
Au niveau de la production musicale, comment est venu le choix des sonorités électroniques ? De votre rencontre avec votre ingénieur du son ?
Charlotte : On avait déjà un goût pour les sonorités des années 80.
Soline : Dâun point de vue technique, câest aussi ce qui nous convenait le mieux. C’Ă©tait simple, on pouvait fonctionner Ă distance, chacune dans nos chambres. On nâavait pas forcĂ©ment le matos pour se lancer dans un enregistrement avec des instruments acoustiques.
Charlotte : Mais on a tout de mĂȘme un peu envie dâĂ©voluer vers plus dâacoustique. De faire Ă©voluer notre spectacle en ce sens.
Soline : Comme on prend petit Ă petit un peu plus confiance dans notre performance, on se dit quâon va peut-ĂȘtre pouvoir y amener de nouvelles interprĂ©tations plus acoustiques.
On a dĂ©jĂ Ă©voquĂ© ensemble un peu plus tĂŽt votre reprise de la chanson âSans Mensongeâ, interprĂ©tĂ©e par lâactrice Marie Gillain et extraite du film de GĂ©rard Lauzier âMon PĂšre ce HĂ©rosâ sorti en 1991, avec notamment GĂ©rard Depardieu en acteur principal. Jâai vraiment adorĂ© ce titre. Quâest ce qui vous a donnĂ© envie de reprendre cette chanson complĂštement oubliĂ©e depuis sa parution ?
Charlotte : Jâai redĂ©couvert âSans Mensongeâ en lâĂ©coutant sur le site Radiooooo, en tapant âannĂ©es 80â et âFranceâ. Je me suis alors rappelĂ©e que jâavais vu le film dont elle est issue. La chanson a aussi tout de suite plu Ă Soline. Le dĂ©pouillement sonore, cette voix innocente, enfantine, dont on sent quâelle ne provient pas dâune chanteuse, tout cela crĂ©e un charme fou je trouve. Aussi, on sâappelle Club VĂ©ritĂ©, donc âSans Mensongeâ a Ă©tĂ© notre premiĂšre envie de chanson ! Ăa a Ă©tĂ© la chanson Ă la base de notre projet de groupe.
Soline : Et on y a mĂȘme pensĂ© pour notre nom de groupe.
Charlotte : Mais Sans Mensonge était un peu triste pour un nom de groupe. Club Vérité est comme son versant positif.
âSans mensonge, quand jây songe, la vie serait carrĂ©ment tristeâ disent les paroles. Il y a donc Ă©videmment un cĂŽtĂ© complĂštement ironique dans votre nom de groupe. Vous vous dĂ©guisez, vous transformez, vous jouez avec les dĂ©cors, les costumes dans votre spectacle. Vous ne faites que maquiller la vĂ©ritĂ© âŠ
Charlotte : Ce groupe est pour nous une maniĂšre de mettre en exergue des sentiments et de les calfeutrer par de lâartifice ⊠Câest pas mal ce que je dis ⊠(rires)
Soline : Elle a réfléchi à la question !
Charlotte : Câest marrant, câest quand on parle des choses quâon y rĂ©flĂ©chit et quâon finit par poser des mots sur ce quâon fait. Câest Philippe Katerine qui dit que parfois les journalistes ont lâair dâen savoir beaucoup plus que lui sur ses propres chansons.
Soline : Par rapport Ă notre nom de groupe, le petit clin dâoeil au âClub DorothĂ©eâ nous plaisait bien aussi, dâailleurs on y fait rĂ©fĂ©rence avec notre logo. On est toutes les deux issues de cette gĂ©nĂ©ration âClub DorothĂ©eâ.
Charlotte : Enfin moi jâavais pas le droit de regarder Club DorothĂ©e, mes parents trouvaient ça trop con. Du coup ça mâa fait fantasmer toute mon adolescence. Je ne devrais pas dire ça, jâadore mes parents !
Câest comment de crĂ©er de la musique Ă deux ?
Charlotte : Jâai envie de souligner le fait que câest quand mĂȘme dingue de trouver aussi Ă©vident de faire de la musique Ă deux. Lâune sans lâautre, je ne suis pas sĂ»re quâon ferait grand chose. Lâune arrive avec une suite dâaccords, lâautre arrive tout de suite Ă la pimper pour en faire autre chose. Câest ça notre partie ping-pong, on surenchĂšre. Soline mâa aussi poussĂ© Ă chanter, alors quâau tout dĂ©part, je dĂ©clamais simplement nos textes. On sâĂ©lĂšve ainsi mutuellement dans notre construction musicale. Et puis, câest quand mĂȘme cool de partir avec des bĂ©quilles pour vivre quelque chose dâaussi fort avec quelquâun et ne faire quâun. (rires)
Soline : On se complĂšte bien, câest sĂ»r, dans nos personnalitĂ©s. Et puis parfois, sur certaines chansons, on cherche, on galĂšre. Et on sait toutes les deux intuitivement quand on a enfin trouvĂ© la bonne idĂ©e que la chanson est terminĂ©e.
Charlotte : Alors, on débouche la bouteille et on danse sur la table !
Justement, quand est-ce que vous arrivez à savoir que vous avez terminé une de vos chansons ?
Soline : En cours de route, on a souvent des blocages, on met du temps Ă finir.
Charlotte : Et puis quand on réécoute les chansons, on est encore conscientes des passages Ă retravailler, notamment Soline qui a une oreille hyper fine je trouve. Je ne sais pas comment on dĂ©cide quâune chanson est terminĂ©e en tout cas… câest toujours trĂšs mystĂ©rieux. Les morceaux peuvent ĂȘtre tellement revisitĂ©s et prĂ©cisĂ©s en permanence.
Soline : « On peut rentrer dans plusieurs champs et câest cool, ça nous fait rencontrer plein de personnes diffĂ©rentes. »
Vous ĂȘtes Ă©galement artistes visuelles. Comment se passe la crĂ©ation de vos Ćuvres en comparaison Ă la crĂ©ation de vos chansons, dans le fait de savoir les terminer ?
Charlotte : Quand on peint toutes les deux Ă la gouache, câest toujours difficile de se dire que la toile est terminĂ©e. Surtout que la gouache, ça se remĂ©lange tout le temps! Mais je pense que câest le cas de tous les projets.
Soline : Mais jâai quand mĂȘme lâimpression que le fait de terminer une chanson nâa jamais Ă©tĂ© un problĂšme pour nous, on le sait assez instinctivement, comme si câĂ©tait Ă©vident.
Quelle est votre impression du monde de la musique par rapport Ă celui des arts plastiques/visuels ?
Charlotte : Pour lâinstant nous nâavons jouĂ© que dans des centres dâart contemporain.
Justement, comment percevez-vous ce milieu de la musique, vous auriez envie dây rentrer Ă©galement, Ă terme ?
Soline : Pour lâinstant nous saisissons surtout les opportunitĂ©s de Charlotte qui a dĂ©jĂ sa place en tant quâartiste dans le monde de lâart contemporain. Et je pense quâon a une petite timiditĂ© Ă aller vers le monde de la musique parce quâon ne se considĂšre pas encore comme des musiciennes.
Et vous nâauriez pas envie de raccrocher les deux wagons, entre champ de lâart contemporain et champ de la musique ?
Charlotte : Si si, mais le projet vient Ă peine de sortir, et trĂšs vite nous avons eu des propositions pour jouer dans des artist-run spaces, des galeries, nous avons Ă©tĂ© invitĂ©es au Salon de Montrouge … Il y a Ă©galement un centre chorĂ©graphique qui a vu dans notre projet un intĂ©rĂȘt pour sa programmation de danse, mais Ă©galement un festival de musiques Ă©lectroniques et actuelles. Donc, tout reste possible pour nous en termes de discipline : danse, théùtre âŠ
Soline : On pourrait mĂȘme penser au cirque, parce quâil y a quelque chose de clownesque dans notre spectacle. Ou au music-hall. On peut rentrer dans plusieurs champs, on est plutĂŽt pluridisciplinaires, et câest cool, ça nous fait rencontrer plein de personnes diffĂ©rentes.
Et donc tous ces centres dâart contemporain ou de chorĂ©graphie se montrent Ă©galement trĂšs intĂ©ressĂ©s par vos chansons en tant que telles, ou plutĂŽt par lâaspect visuel, le spectacle qui les accompagne ?
Soline : Je pense que ces centres dâart contemporain se montrent plutĂŽt intĂ©ressĂ©s par notre spectacle, oui. Ceci dit, Ă chaque fois, on a autant de retours sur lâaspect visuel de ce quâon propose que sur nos chansons.
Merci Club Vérité pour votre disponibilité, votre gouaille et votre sincérité. On finit par notre invitation traditionnelle à nous citer une chanson écrite en français de votre choix pour conclure notre rencontre.
Charlotte : Je crois que Soline dĂ©teste ma chanson prĂ©fĂ©rĂ©e. Câest âPull Marineâ dâIsabelle Adjani.
Soline : (immense suspense **)
** Soline a prĂ©fĂ©rĂ© ne pas donner de rĂ©ponses Ă cette ultime question, ce suspense durera donc toujours …
Club Vérité x Les Cheveux dans le Vent x paru le 7 avril 2021 (Club Vérité)

Les pistes :
- Ronde
- Sans Mensonge (reprise)
- Slow à Vélo
- Chenille Leu Leu
- Le Gramophone
- Rhume Tropicale
- Mic Mac
- FantĂŽme Reggae
- Les Cheveux dans le Vent
- Bigzoubizou ( double reprise)
Retrouvez Club Vérité ici : https://clubverite.bandcamp.com/album/les-cheveux-dans-le-vent-2
Propos recueillis par Simdo
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